jeudi 6 août 2015

Rencontre avec Abdelmalek Terkmani au musée de Rabat



Rencontre avec le chercheur Abdelmalek Terkmani 
au Musée Mohamed VI à l'exposition 
Maroc Médieval : Un empire de l'Afrique à l'Espagne 
Le 26 Juillet 2015


Le groupe de Marrakech est arrivé à Rabat à11h30. Ont rejoint ce groupe, deux personnes de Rabat, 4 de Casablanca et 1 de Kénitra.
Le Musée Mohammed VI, inauguré le 8 octobre 2014 par SM le Roi, est dédié essentiellement à l’art  moderne et contemporain, qui occupe le premier étage, pour le moment. Depuis 2012 au moins, il était prévu que l’Exposition « Le Maroc médiéval », après avoir séjourné  au musée du Louvre à Paris, viendrait au Maroc, pour  faire connaître et amplifier l’annonce des activités de ce musée auprès du public marocain et du monde des arts.

Le Maroc médiéval

La visite de l’exposition itinérante « Le Maroc médiéval » (4 mars-1 septembre 2015) a été organisée le dimanche 26 juillet 2014,  pour profiter d’une occasion unique et exceptionnelle d’admirer des pièces liées à l’Histoire du Maroc. Ces pièces  proviennent des quatre coins du monde et il serait très difficile et très coûteux de les réunir de nouveau dans la même exposition, avant quelques dizaines d’années.
Il y a environ 220 objets exposés à Rabat alors que Le Louvre à Paris en présentait 300. La période couverte par cette exposition est d’environ 600 ans et concerne les dynasties des Idrissides (789-985), des Almoravides (1049-1147), des Almohades (vers1116-1269) et des Mérinides (1269-1465).

Certaines pièces ont donné lieu à une présentation détaillée et un échange d’idées très fructueux.
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Lustre-cloche de la mosquée al-Qarawiyyine  733-737 H / 1333-1337

Lustre-cloche dans la mosquée al-Qarawiyyine.
Alliage de cuivre. Poids : 10 quintaux
Les troupes du roi mérinide Abu Al Hassan ont rapporté à Fès ce butin de Jabal al-Fath (Gibraltar). 

Cette cloche a ensuite été transformée en lustre, par un excellent travail d’orfèvre. Il a été nécessaire de construire une coupole spéciale dans la mosquée al-Qarawiyyine, compte tenu du poids de la cloche. Malgré tout, on dit que cette cloche qui sonnait les heures de prière chez les Chrétiens, éclaire maintenant les travées d’une mosquée de l’Islam, et que c’est un bon signe de rapprochement.

                       
Livre d’Ibn Battouta, « Voyages »

Quelques vers extraits du livre original «  Voyages »(Rihla) d’Ibn Battouta décorent bien le hall central du musée. Si Hajib Jerbi de notre groupe de Kénitra, a très bien expliqué la forme grammaticale de ces vers. On voit bien que c’est un voyageur et un géographe qui s’exprime ; il parle des mouvements apparents du soleil et de la lune,  les deux astres  qui indiquaient le lieu et l’orientation aux  caravanes qu’il suivait. Aujourd’hui, on dirait que le Maroc est le plus beau pays du monde, mais pas pour les mêmes raisons….

                                          


L’Occident (le Maghreb) est la plus  belle des terres

Et j’en ai la preuve :

La pleine lune s’y observe,

Et vers lui le soleil se rend

Ibn Battouta,




 Astrolabe d’Abû Bakr Ibn Yûsuf

Astrolabe d’Abû Bakr Ibn Yûsuf,
exposé au Louvre, en octobre 2014.

En laiton (alliage de cuivre et de zinc).
Diamètre : 15,2 cm
Cet astrolabe est exposé habituellement au Musée Paul-Dupuy à Toulouse. 
Il a été fabriqué à Marrakech en 613H/ 1216-1217. 

Il est conçu pour fonctionner sous la latitude des villes de : Saragosse (41°30’), Tolède (40°), Cordoue (38°30’), Séville(37°30’), Almeria(36°30’), Sebta(35°30’), Fès ( 33°40’), Marrakech(31°), Al Qods(32°), Misr(29°55’), Médine (25°) et la Mecque(21°40’).



Tout le groupe a suivi un bref exposé à côté de la vitrine « scientifique », et de nombreuses questions ont été posées,  ce qui montre l’intérêt porté à cet astrolabe et à son fabricant. Voici résumées ces questions/ réponses :

Comment cet astrolabe est-il parvenu à Toulouse ?
Probablement parce qu’il était prévu pour fonctionner à Saragosse assez proche,  en Espagne. Il a dû constituer un butin des armées françaises voisines.  

Planisphérique ? 
On savait que la terre est ronde et qu’elle est enveloppée par la sphère céleste sur laquelle sont incrustées les étoiles. On a trouvé plus pratique de travailler sur un plan que sur une sphère. Donc on a projeté sur un plan ce qui a sur la sphère. D’où planisphérique. Par exemple l’araignée est une représentation plane de la voûte céleste.

Nombre de tympans ?
un tympan comporte des éléments liés à la latitude d’un lieu. On ne voit pas une étoile, mettons polaire, sous le même angle quand on est à Stockholm ou à Marrakech. Les tympans d’Abû Bakr sont utilisables sur  les deux faces, ce qui explique qu’il y a deux fois plus de villes que de tympans.

Pourquoi un heurtoir et un astrolabe dans la même vitrine ? 
Les heurtoirs des portes de mosquées, par exemple, sont gravés par des prières (Bismillah). Il y a donc un travail de gravure et aussi de calcul géométrique, de telle manière que heurtoir et astrolabe sont fabriqués dans les mêmes ateliers. 

                                                        
Heurtoirs de portes de mosquée. 

Pourquoi le nom des savants fabricants de ces astrolabes ne figure-t-il pas dans la vitrine ?
De nombreux articles ont été consacrés à cette question.  On peut dire qu’il ne s’agit pas d’un oubli, mais d’une volonté délibérée de cacher les noms de ces astronomes. Ces derniers sont Abû  Bakr Ibn Yûsuf (Marrakech)  pour l’astrolabe de droite et Abû al-Fattouh al Khamayri (Marrakech et Séville) pour l’astrolabe de gauche. On ne comprend pas que ces noms soient donnés quand ces astrolabes sont exposés dans le monde entier et disparaissent quand ils sont exposés au Maroc, pays de ces astronomes !
                   
Pourquoi cet astrolabe serait-il l’un des plus admirés au monde ?
Parce que sa photo fait la couverture de nombreux ouvrages sur l’astronomie comme ‘’Les instruments de l’astronomie ancienne’’ et ‘’L’Astrolabe, histoire, théorie et pratique’’. Dans ce dernier ouvrage, l’auteur Raymond d ’Hollander prend cet astrolabe comme modèle et l’étudie  pièce par pièce, car dit-il, il est particulièrement complet et précis. De plus, il est exposé dans les grands musées du monde.
La visite s’est poursuivie dans le premier étage pour le volet art moderne et contemporain.
On note quand même que les concepteurs de ce musée ont bien donné le nom de certains peintres marocains contemporains à des salles d’exposition : Salle Gharbaoui, salle Charkaoui,  ce dont il faut se féliciter, mais on est forcé de penser que nos astronomes du 13ème siècle, illustres pourtant depuis des siècles à l’étranger, n’ont pas de chance dans le Maroc actuel. 


Note : Pour plus d’informations sur le Maroc médiéval, Abû Bakr Ibn Yûsuf et son astrolabe, voir 



Abdelmalek Terkmani, chercheur international



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